Le vent soufflait doucement entre les arbres de la foret enneigee.
La nuit etait tombee.
C'etait une nuit claire, avec peu de nuages, des etoiles, et un magnifique lune gibbeuse.
Dans le clair de lune scintillait la neige.
Dans le clair de lune scintillait la fourrure du loup...
Le loup marchait a pas lent, hesitant.
Ses coussinets s'enfoncient legerement dans la neige, avec un petit crissement.
Il avait la gorge noue de retrouver la neige.
La neige...
C'etait la qu'il aurait du vivre, et non dans le desert brulant.
Mais il avait ete trop arrogant, trop bete pour le comprendre.
Et surtout pour comprendre qu'il ne reverrait plus sa soeur, et qu'elle lui manquerait.
Gedewey etait seul.
Seul, depuis toujours.
Sa mere s'occupait plus de Yawe que de lui, il n'avait pas de pere.
Et a la mort de la vieille solitaire, il s'etait dispute avec Yawe.
Elle etait entree chez les Celestials -par contradiction, il etait alle voir les Sakarites.
Il s'y etait fait...
Mais il n'avait jamais trouve sa place.
Ce monde n'etait pas fait pour lui...
En apprenant la mort de Yawe, le jour ou il avait rencontre sa fille (il ignorait meme qu'elle avait une fille), le mage s'etait jure de ne plus revoir la neige..
...Avant d'y mourir.
Et ce jour semblait venu.
Un fracas de branhes tira le male de ses pensees et, tournant la tete, il assista a la prise d'une palombre, qui tentait vainement d'echapper au renard qui la tenait.
Avec une moue ecoeuree, le Sakarite a l'epaisse fourrure argentee poursuivit sa marche.
Il ne savait pas trop ou il allait, ce qui faisait.
Il cherchait simplement le moyen d'en finir...
Au pire, s'il ne trouvait rien, il finirait par mourir de froid.
Car malgre sa fourrure protectrice, Ged' etait a present habitue a la chaleur de Sarique, et il ne tiendrait pas la nuit.
Mais il ne mourrait pas comme cela.
En effet, le loup se trovuait a present au bord d'une petite falaise.
Il s'avanca le plus au bord possible, regarda en bas.
Il tremblait.
Il deglutit.
Le loup eut une rapide pensee pour Rubya, pour ses enfants...
L'avait-elle jamais aime ?
Il ne l'avait point revue..
Qu'importe, a ses yeux comme a ceux des autres, il etait invisible.
Inexistant.
Inutile...

- Je mourrai comme j'ai vecu, dans un monde ou je n'ai pas ma place, dans l'anonymat et l'indifference... -

Au moins, il n'y aurait personne pour l'en empecher...
Et sans autre forme de proces, le loup fit un pas dans le vide.