Ce hurlement ne tomba pas dans l'oreille d'une sourde.
Mais peut-etre pas la bonne pour autant...
En fait, peut-etre aurait-il mieux valu que personne ne l'entende, plutot que ce fut par elle.
Alcarin etait revenue au cimetiere, une fois de plus.
Pourquoi ?
Elle ne connaissait personne qui y soit enterre.
Et pourtant, sa presence ici s'expliquait de bien des facons.
Apres tout, le hasard n'existe pas...
C'est du moins ce que pensait la louve.
Si ses pas la ramenaient regulierement en ce lieu, c'est tout simplement qu'elle s'y sent bien.
Ca parait idiot, hein ?
Sombre, cruel..
Comment se sentir bien en un tel lieu, ou ne regne que la mort, la desolation...
Peut-etre parce qu'elle ressemble au cimetiere, qui camouffle tout cela derriere des tombes aux belles pierres blanches.
Peut-etre aussi parce que c'est le seul endroit ou la solitude paraisse acceptable, naturelle, et qu'elle s'y rendait lorsqu'elle s'ennuyait, se sentait seule ?
Peut-etre parce que les ames en peine qu'on y trouvaient etaient plus aisees a aborder ?
Qui saurait le dire...
La solitaire etait certainement la pour toutes ces raisons a la fois, et bien d'autres encore.
Ce qui fait que, en entendant cette voix, un sourire parut sur son visage, comme un oiseau farouche, qui passe et qui s'en va.
Ce sourire disparut aussitot qu'il etait venu, tandis que la louve changeait la direction que prenaient ses pas pour se diriger vers ce loup en peine.
Ceux qui la connaissent le mieux, les plus sceptiques, iront dire que ce sourire trahit sa cruaute.
D'autres attribueront cela a l'idee d'avoir un peu de compagnie, de se rendre utile en en procurant, se disant juste que cette louve ne reagissait pas tout a fait comme tout le monde.
Nul ne saurait trancher entre les deux, pas meme elle.
D'une certaine facon, elle savait que, tot ou tard, elle serait desagreable avec loup, d'une facon ou d'une autre.
D'un autre cote, elle savait qu'elle pourrait peut-etre le soulager un peu de sa peine, lui procurer un peu de reconfort.
Oui, vous avez bien entendu.
Alcarin ne se contentait pas toujours de jouer.
Elle avait un coeur, elle aussi, des sentiments, dont elle se jouait au moins autant que de ceux des autres.
Il lui arrive de se servir de son don, de son jeu, pour apaiser les autres, leur faire croire au recondort, au bonheur, au plaisir...
Elle oublie le moment ou tout basculera, se concentrant sincerement sur l'instant present.
Apres tout, si l'on est si malheureux quand le bonheur s'en va, c'est que l'on a ete si heureux...

[ Saez <3 ]

Alcarin marqua un temps d'arret.
Ses oreilles se coucherent sur son crane et ses yeux d'or fixaient le loup.
Puis une sorte de sourire, peu assure pourtant, timide et presque provacateur en meme temps, s'afficha sur son visage.
Elle se remit a avancer, sans plus tenir compte de l'air du loup.
Elle s'arreta cependant a quelques metres du male, par prudence et par respect.
Silencieusement, elle le devisagea, puis son regard glissa sur les tombes pres de lui, sur lesquelles elle lut des noms.
Toujours sans parler, elle regarda a nouveau cet enfant qui se croyait grand, si fort, mais qui jamais ne parviendrait a dompter la vie.
Personne n'y parviendra jamais, mais, enfants que nous sommes tous, nous avons toujours un instant pour y croire.
Son sourire avait disparu.
Elle eut un grimace, qui pouvait ressembler a ces sourires que l'on fait lorsque l'on ne sait pas sourire.
On pouvait y lire une certaine maladresse, un sentiment de gene vis-a-vis de cette gaucherie, un peu de douleur et d'amertume...
Mais ses yeux, eux, ne trahissaient rien d'autre que de la severite.
Severite, dans le sens ou la louve etait plus serieuse que jamais, qu'elle savait ce qu'elle pensait et dirait.
Ce n'est qu'apres ce long dialogue silencieux qu'elle prit la parole, se risquant a entrer dans le vif du sujet.
Un sujet douloureux, elle le savait, avec un loup inconnu qui ne semblait pas avoir envie de la voir.
Mais tant pis, elle risquerait quand meme.
Les risques, ca la connaissait.
Et puis, quand bien meme elle devrait se faire etripper sur place, il n'y aurait personne pour pleurer.
Pas meme elle.

- De la famille ? -

Alcarin cessa de le fixer, a l'entente de se paroles.
Elle n'insisterait pas.
La reponse etait certainement "oui".
Quoi qu'il en soit, cela n'avais pas grande importance, elle venait de voir que, meme s'il semblait difficile a aborder, il y avait un semblant d'espoir.
La preuve : elle etait toujours en vie, et sans blessure, en plus !
La louve s'eloigna un peu et s'allongea.
Elle saurait etre patiente.
Apres avoir observe le silence un moment, elle se deicda a repondre.

- Un peu de compagnie. -

Elle eut un sourire dans le vague.
Le male ne comprendrait certainement pas, mais cela signifiait qu'elle avait obtenu la compagnei recherchee, meme en la personne de ce loup froid et agressif.
Elle laissa passer un autre silence.
Elle n'aimait pas parler trop en ce lieu, si elle devait parler, elle prenait toujours garde a espacer ses paroles et a laisser de grands silences.

- Je ne t'embeterai pas plus que cela, je saurai me faire discrete et silencieuse. Si tu veux, tu peux meme partir, je ne te suivrai pas sauf si tu me le proposes. Mais je reste la, si jamais tu avais plus besoin de ocmpagnie, toi aussi, que tu ne le montres.. -

Cela dit, elle replongea dans le silence et laissa son regard fixer un point invisible, ressentant les lieux...