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| Sujet: Ainsi, c'est comme cela que tout se termine... 23.06.08 7:26 | |
| Poison qui s'insinue lentement dans les veines, brasier de feu liquide qui embrase tout le corps. Douleur sourde, entêtante. Les muscles qui ne répondent plus, le sang qui bat violement aux tempes. Le sifflement du vent, l'éclat du soleil... la chaleur qui fait onduler le sable, le froid qui s'empare de tout le corps.. Les ténèbres qui s'engouffrent rapidement dans le champ de sa vision.. Souvenirs, récents et pourtant déjà si lointains...
Muscles brûlants sous l'effort, langue pendante, galop court et puissant. Toblerone s'amuse comme un petit fou, à courir ainsi dans le désert brûlant de sa naissance. Le loup brun-sable adore courir ainsi jusqu'à épuisement, sentir ses muscles devenir douloureux et filer plus vite que le vent. Quel délice que ces courses contre le temps, contre l'espace, contre tout, avec la terre et avec le monde.. Haletant, le jeune mâle s'était enfin arrêté. Il se trouvait au fond d'une immense crevasse. Le Ravin des Abysses, avait-il rapidement compris. L'ombre de ces roches rafraîchissait quelque peu l'atmosphère étouffante et son sang bouillant après l'effort. Etant un loup, Toblerone ne pouvait transpirer que par ses coussinets, ce qui n'améliorait pas vraiment la température de son corps. Sa langue pendante tentait d'attraper un peu de fraîcheur. Très vascularisée, le sang qui circulait à l'intérieur se rafraîchissait au contact de l'air, et cette faible fraîcheur se propageait ensuite dans tout l'organisme.
Le jeune loup s'était allongé, adossé à la paroi. Un sourire exalté peint sur la figure, un sentiment d'euphorie au coeur, une douleur insistante irradiant de ses muscles. Ses paupière s'étaient abaissées sur ses yeux brûlés par le soleil. Birèvement. Cela avait largement suffit. Le serpent était sorti de sa cachette en sifflant. Toblerone avait ouvert les yeux. L'animal était passé à l'attaque. Le loup avait bondit sur ses pattes, reculé à une vitesse qu'il n'aurait même pas imaginé possédait. Il était très rapide. Sans comparaison aucune avec un humain. Mais le serpent l'était tellement plus. Il avait enfoncé ses crochets venimeux dans la patte antérieure droite du jeune loup. Seul juge de l'existence de Toblerone, sa sentence venait de tomber. On ne perturbait pas sans risques le territoire de ce dangereux reptile. Le jeune loup était d'ores et déjà condamné.
Et tandis que le venin agissait, il avait lui aussi compris. Compris l'inéluctable, compris qu'il allait mourir. Il n'y avait aucun échappatoire possible. Il existait des antidotes, mais le venin était tellement rapide.. tellement mortel. Déjà, le loup ne pouvait plus tenir debout. Il s'était effondré comme une marionette à qui on aurait coupé les fils. Il allait mourir.. cette unique phrase le frappa comme un coup de gourdin.
Peu à peu, les battements du coeur de Toblerone se firent plus irréguliers, ralentirent. Toute force l'avait déjà quittée, il était à peine capable de soulever ses paupières pour regarder une dernière fois le soleil. Curieusement, sa mort prochaine ne l'effrayait nullement. Il l'attendait avec impatience, tout en luttant férocement contre elle. Il avait hâte de se réfugier dans les ténèbres de l'oubli pour fuir ce feu qui le dévorait de l'intérieur, et en même temps ne voulait pas mourir. Il était si jeune ! Sa vie se cousumait lentement, alors qu'elle aurait dû éclater tel un soleil, illuminant un long chemin semé d'embûches. Il allait mourir... Le serpent qui l'avait mordu sifflait encore furieusement. Impossible d'identifier son espèce... tout était flou autour de lui. Les roches rouges et ocres du Ravin se brouillaient, le soleil se mélangeait au bleu du ciel. Tout n'était plus que tourbillon de couleurs, qui lui-même semblait être aspiré par l'obscurité grandissante. Oui, il faisait si noir... Comme ce serait facile de fermer les yeux et de se laisser emporter par cette nuit ! Le coeur de loup s'arrêta, hoqueta comme un moteur qui a du mal à démarer, repartit, rata un temps, puis deux.. Le poison brûlant qui se déversait dans ses veines était impitoyable. Enfin, presque avec docilité, le mâle abaissa ses paupières. Elles étaient si lourdes... La nuit s'empara de son âme.
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