Un loup assez jeune, robuste, a l'allure fiere marchait d'un pas lent dans la vallee. Sa queue etait recourbee avec panache et ses epaules redressees lui donnaient un port de tete superbe. Sa douce fourrure grise etait secouee par un vent leger. Les yeux du loups regardaient le sol. Il se demandait ce qu'il faisait ici... Ce paysage l'ecoeurait. Trop monotone. Trop simple. Mais le simple fait de vivre etait deja une compensation. Vivre.. Pour combien de temps ?
Comete secoua la tete. Non, il ne fallait pas y penser. Et pourtant, c'etait impossible. Combien de temps tiendrait-il ? Combin de nuits passeront encore avant que le demon ne se fasse incontrolable ? Etait-il vraiment ainsi ?
Dans ses prunelles brillait une lueur pourpre.
Pourpre de sang.

Comète releva les yeux.
Il vit une jeune louve, non loin de lui. Il la dévisagea un instant puis, avec un sourire doux, s'adressa à elle en ces termes :
- Bonjour. Je me nomme Comète, guerrier Devil..
Il s'inclina légèrement.
- Me feriez-vous l'honneur de me faire connaître votre nom ?
Il souriait sincèrement, de ce sourire tendre qu'il avait appris à faire. Mirage... Son coeur se mit à battre un peu plus vite. L'image de sa louve, dans ses pensées, venait de dissper ses inquiétudes.

Le loup sourit malicieusement.
- Enchanté, Fugue !
Il la regarda un moment, souriant. Elle avait l'air pleine de vie. Le genre de louve toujours joyeuse qui vous remontait le moral en un rien de temps ! Levant les yeux au ciel, Comète acquiesça en silence. Oui, c'était ça.
A présent, ce ciel bleu l'attirait. L'herbe verte se révélait appaisante. Ses pensées noires, elles attendraient ! Aujourd'hui, le monde est beau.

Le loup la regarda chasser. Elle était douée. Vive et précise, plus silencieuse que les brins d'herbes, et aussi souple que le vent... Il sourit.
Lorsqu'elle lui rapporta le lapin et qu'elle le déposa à ses pattes, il put admirer l'adresse contenue dans l'unique coup qu'elle lui avait porté. Elle avait l'habitude de chasser, cela se voyait. Il ne put s'empêcher d'avoir une grimace comique. Dire qu'il ne savait toujours pas chasser ! Un de ces jours, il faudrait qu'il demande à quelqu'un..
- Oui, je veux bien.
Il se rapprocha d'elle et sourit doucement, lui laissant la première bouchée.
- Honneur au cuistot !

Comète éclata de rire à son tour. Il ne savait pas pourquoi ; mais la gaieté de la louve était contagieuse !
Il mordit à son tour dans l'animal fraîchement tué et mâcha le tout en vitesse. puis, se passant la langue sur les babines, il savoura le goût qui restait sur son palet.
- Miam, c'est délicieux !
Il était détendu, et heureux. Il adressa un clin d'oeil à Fugue, emporté dans son élan de joie. Oh, et puis ! A bas les principes ! Ils étaient jeunes et la vie leur appartenait !

Le loup suivit son regard et vit les oiseaux. Il pensa immédiatement à Avalanche. Il eut un sourire. Alou, son amie, était une louve qui n'avait qu'un rêve ultime : voler. Or elle savait tout comme lui qu'elle n'y parviendrait jamais. Mais cela ne coùutait rien de rêver...
Comète ne put cependant s'empêcher d'être inquiet. Il lui était arrivé, plusieurs fois, de faire le rapprochement entre ce rêve et la mort, alors qu'il se sentait mal et que la vie ne semblait plus valoir d'être vécue. Et il craignait que son amie, poussée par son rêve impossible, n'y pense à son tour. certes, Avalanche n'était pas le genre de louve à mettre fin à ses jours aussi violemment, mais.. Qui sait à quel point un rêve peut vous être cher ?

Les yeux du guerrier se posèrent sur Fugue. Elle, en tous cas, n'agirait jamais de la sorte ! Elle était bien du genre à rêver, oui, mais c'est la vie qu'elle prenait pour un rêve.
Il sourit et reprit une bouchée de lapin.

Sorti de ses pensées, le loup acquiesça avec un sourire doux.
- Oui, je pensais à une amie...
Il reposa son regard sur les oiseaux qui virevoltaient dans le ciel et soupira.
Puis il détourna les yeux et regarda Fugue.
- Et toi, tu m'as l'air bien songeuse... A quoi penses-tu donc ?
Il lui sourit.

Ces paroles frappèrent le loup comme un violent coup de vent. Ses pensées au sujet d'Avalanche l'assaillirent de nouveau.
Confus, il baissa les yeux, ignorant la raison de cette inquiétude dépourvue de sens.

*Non... Pourquoi je pense à ça ? Voler.. Ce n'est qu'un rêve innocent, rien d'autre...*

Sans qu'il sache pourquoi, il se mit à pleurer.

*Avalanche..*

Maintenant, il savait ce qu'il avait.
Son amie lui manquait.
Terriblement.

Le loup releva la tête, quelques larmes coulant toujours. De ses yeux brillants, il fixa Fugue avec gratitude et douceur.
- Non, ce n'est pas toi...
Il essuya ses pleurs avec la patte et posa son regard humide sur le ciel.
Les oiseaux avaient disparus là-haut. Il ne put s'empêcher d'imaginer Alou avec eux..
- Pour tout te dire, j'ai une amie qui possède exactement le même rêve que toi. Mais je la sais assez forte pour aller jusqu'au bout.. Et j'ai peur.
Il reporta son regard sur la jeune louve.
- Quand je l'ai connue, elle avait l'air d'une adulte mais ce n'était encore qu'une enfant. Sans qu'elle le sache, je m'en suis occupée comme de ma fille. Mais à présent elle a grandi. Un mur nous sépare. Cela fait si longtemps que je ne l'ai pas vue... Elle me manque, et j'ai peur de ne plus jamais la revoir.
Il baissa les yeux.
- Mais j'ai aussi peur de la revoir.

Comète eut un petit sourire.
- Oui, tu as raison...
Il n'y avait aucune raison de s'inquiéter ! Mais cela avait fait revenir son doute. Elle lui manqait. Mais il avait peur, s'il allait la voir, de se retrouver face à une inconnue, une louve qu'il n'aurait jamais vue, ou qu'une fois, lorsqu'il lui a dit adieu...

*Pourquoi l'ai-je aidé à grandir ?*

Il le regrettait, à présent.

*Non..*

Il eut un véritable sourire à l'adresse de Fugue.

*J'ai bien fait, elle comptait sur moi.*

Il donna un coup de langue à la louve, pour la remercier. Puis il se leva et s'en alla. Avant de disparaître de sa vue, il lança à Fugue :
- Merci beaucoup, Fugue, je n'oublierai jamais ta gentillesse ! A un de ces jours !
Sur ce, il s'éloigna, le coeur plus léger.