Chapitre 1
Quel cruel destin qu'on avait donné à ces petits. Assise, les oreilles pointées vers le bas, les yeux plein d'eau, Plume d'Aigle pleurait la mort de ses deux filles et de son fils. Elle maudissait la saison des neiges qui enlevaient si souvent les petits à leurs parents. La solitaire se coucha dans la neige poudreuse qui crissa sous son poids. Le vent frais du soir fut ensuite le seul bruit qu'on entendit, passant entre les branches des arbres de la forêt. De haut, on aurait dit que cette clairière était un point d'un blanc immaculé au milieu des arbres noirs dépourvus de feuilles et des conifères. La louve passerait la nuit près des trois petits corps. Un blanc, un gris et un brun. Plume d'Aigle s'en voulait de ne pas avoir su les protéger. C'est ainsi qu'elle passa la nuit étendue dans la neige, éclairée par la lumière du croissant de lune qui perçait le ciel d'ébène.

Elle se réveilla le lendemain. Elle devait maintenant faire ce que tous parents ne voulaient pas faire : enterrer ses enfants. Elle creusa la neige jusqu'à découvrir le sol dur et gelé. Elle parvint à faire un trou profond où elle déposa les corps. Si jeunes... C'est avec le plus grand chagrin qu'elle enterra ses enfants dans le fond du trou. L'amour qu'elle leur avait porté était sans fin et maintenant elle devait repartir le coeur lourd, une impression de culpabilité agrippée à elle.

Elle ne savait pas qu'à partir de cet instant, sa vie et celle d'un autre serait bouleversées.

Chapitre 2
Patchi était assit sur la clôture. Le chaton regardait la forêt qui s'étendait au-delà de la ville des hommes. Il avait toujours vécu avec un couple d'humain et leur enfant, une petite fille de six ans. On l'avait cruellement arraché à sa mère pour l'offrir à ces deux humains en échange de quelques feuilles de papier gribouillées de symboles. Il rêvait de liberté et rêvait de chasser dans les bois en compagnie d'animaux sauvages. Il en avait assez de cette vie monotone.

C'était l'heure. Minuit sonna. Il allait devoir prendre une décision. Rester ici, dorloté et chouchouté à manger une nourriture sèche et infecte, à se faire arracher le poil par une machine piquante, à devoir toujours obéir et à ses faire couper les griffes... ou vivre en liberté dans une forêt, avoir le poil sal, avoir faim et froid, être malade et mourrir jeune. Patchi su qu'il était fait pour la nature. Ses yeux verts jetèrent un dernier coup d'oeil à la maison. Ses maîtres agitaient un paquet de nourriture et l'appelaient. Mais maintenant, il savait qu'il ne resterait plus ici. Il sauta de la clotûre et s'enfuit dans le bois. Il courrut, courrut à en perdre haleine. Il entendit un grognement. Un énorme renard roux s'apprêtait à lui sauter dessus. Ah non ! Il venait de commencer son aventure et il allait déjà mourrir ! Il sortit ses griffes, prêt à se défendre même s'il savait que ce serait inutile. Soudain, une louve brune sortit des fougères et mordit le renard à la patte. Il s'enfuit en gémissant.
-Ce n'est pas un endroit pour les animaux domestiques ! déclara Plume d'Aigle. Retourne chez toi !