Personnage joué: Black Blood-mâle-solitaire

Peut-être qu'un jour je cesserais d'arpenter ces terres, que le soleil sur mon pelage ne me fera plus rien, que la brise qui secoue mon corps me sera désagréable, que la beauté des paysages me paraitront fades. Que tout dans ce monde, ne me feront plus ni chaud ni froid, alors sans aucun doute, c'est que je ne serais plus. Que mon coeur aura cessé de battre, car tant que je sentirais ce tambour dans mon poitrail, il rythmera mon souffle, ma course, ma vie...

L'imposant mâle noir n'écoutait plus que le bruit mat de ses pattes sur la terre, ses foulées, de plus en plus longues le portaient au delà des troncs d'arbres abattus et des rochers. Il n'était en aucun cas taillé pour la course, mais cela ne l'empêchait pas d'aimer la vitesse. Tout autour de lui n'était plus que champs de désolation, le monde, tel qu'il l'avait connu, n'était plus. Un pan entier de la forêt était passée aux mains des hommes, ils l'avaient atrophié, et Black Blood, pouvait ressentir sa peine jusque dans les tréfonds de son âme. Sa douleur était sienne, et en temps que loup, il se devait de faire quelque chose. Il s'était approché du camp tôt le matin, de la fumée montait au ciel d'un tas de branches mortes où les braises se mourraient doucement. Le loup noir s'était approché, son imposante stature refletant son ombre sur les tentes installées autour de lui. Son museau au sol, le loup avait inspecté les environs, bien décidé à trouver ses fauteurs de trouble et pourquoi pas, à leur faire subir le même châtiment imposé à la forêt. Des coups de tonnerre avaient raisonné tout près de lui, leur bruit sec et violent se rappelait encore à son souvenir. Et pour la première fois, il avait eu peur, peur de ce cracheur de feu et de mort, il s'était enfuit, et il courait encore lorsqu'il s'arrêta au bord du lac.
Il s'écroula au sol, à moitié dans l'eau, son poitrail se soulevant avec difficulté. Ses yeux se fermèrent et sa dernière pensée maudit les bipèdes.

Le temps n'avait plus d'impact sur le mâle noir, il sentait ses forces revenir, son pouls battre moi vite, ses idées tumultueuses s'éclaircirent. Il avait été idiot! Le courage ne veut pas dire risquer sa vie pour rien et en sachant pertinament que c'est stupide, quoi que... Avait-il seulement pensé à ceux qu'il aurait pu laissé derrière lui? A celui plutôt, car un seul être comptait plus que tout dans sa vie, un seul, pour qui il ne se posait aucune question de courage ou de stupidité. Les autres, Black s'en fichait pas mal, ils se ressemblaient tous...
Les bipèdes étaient connus pour ne pas faire dans la dentelle, et le mâle ne comprenait toujours pas pourquoi ils les détestaient tant? Qu'avaient-ils fait pour qu'entre toutes les espèces, ce soit la leur qu'ils détruisent en premier? Un instant, cela aurait pu plaire à Black, s'ils les haissaient, ce n'était que parce qu'ils avaient peur d'eux, celle-ci les poussant à comettre leurs crimes sans nom. Cette idée de supériorité aurait fait sourire le mâle noir, et pourtant il savait qu'il aurait préféré que ces bipèdes ne s'interressent jamais à eux. Aujourd'hui ils étaient sur leurs territoires, personne ne sait de quoi est fait le lendemain, et Black était certain que leur avenir ne serait bientôt plus lié au leur.
L'eau frappait en douce vaguelettes contre sa gueule, la laissant entrouverte, il sentit le liquide pur y entrer, brûlant au passage sa gorge d'un feu bienfaisant. Une odeur fint frôler son museau, Black se releva de suite, et planta son regard mordoré dans celui de la nouvelle arrivante. Son pelage, tout aussi noir que le sien, perlait, son souffle court prouvait qu'elle ne venait pas de tout près. Ses instincts se mirent en avant, analysant les points forts et faiblesses de la louve en face de lui. Mais plus que tout ce fut le médaillon qui reposait sur son poitrail qui l'intrigua, il n'en avait jamais vu de semblable, pourquoi le portait-elle? Ses yeux ébènes ne lui apprirent rien et, prudent, face à cette femelle étrange, Black Blood recula de quelques mètres, s'assurant un périmètre de défense discret. Il entra lentement dans l'eau, s'aspergeant d'eau fraiche et retourna dans ses pensées, tout en surveillant l'inconnue de fréquents coups d'oeil.

Black vit la louve levé les yeux au ciel après que son regard se fut fixé sur son médaillon. Et quoi que croyait-elle? Que personne ne la remarquerait, si elle souhaitait être différente, qu'elle assume ensuite les regards posés sur elle. Plissant légèrement les yeux, le mâle tenta de distinguer un symbole étrange inscrit sur la rune, peine perdue, trop loin, et puis de toute façon, il ne l'aurait sans doute pas compris. L'eau buttait contre son poitrail en vaguelettes incertaines, Black Blood aimait ce liquide reposant ou tumultueux, les multiples formes qu'il pouvait prendre, vous émerveillant avant de vous terrifier tour à tour, une force de la nature quoi! Le mâle noir plongea sa tête avant de s'ébrouer, les bienfaits de la fraicheur après une course folle n'avait aucun égal. Black allait revenir vers la rive, lorsque la voix de la femelle retentit derrière lui. Il l'avait presque oublié celle-là, sa tête se tourna avec une lenteur délibérée, comme s'il y mettait toute sa volonté pour porter son attention sur l'origine de cette voix. Elle était assise, le mâle l'avait entendu se déplacer, vive, à une distance respectable du lac. Son corps droit, immobile semblait prolongé par le palmier qui la surmontait, elle avait certes toute l'élégance et le matient d'une reine, elle en avait également tout les défauts.
Ses paroles auraient tiré un sourire hypocrite au loup s'il ne s'était pas retenu. Salir l'eau...il ne l'avait jamais entendu celle là. Bien décidé à ignorer cette louve au caractère de petite duchesse, Black Blood sortit enfin de l'eau et parcourut les quelques mètres qui séparait la glaise de la terre sèche. S'allongeant souplement, il replia ses pattes contre son ventre, sentant déjà la caresse du soleil sur son pelage luisant. Il guetta l'endroit d'où il était arrivé, les bipèdes ne pouvaient l'avoir suivi jusqu'ici, il avait été trop rapide, mais trouveraient-ils ses traces? Black devait bien avouer qu'ils n'étaient pas totalement bêtes, et même rusés pour de fragiles animaux dans leur genre. Les sens en alerte donc, son regard se fixa sur l'horizon sans ciller, pour ne plus s'en décrocher.